Quoi ? : Créateur de mode
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Avec Numa Figuccia, oubliez l’archétype du jeune créateur surexcité puisant son inspiration dans l’effervescence urbaine. C’est dans le cadre paisible d’un atelier dans la campagne aixoise que nous l’avons rencontré pour une interview à rebours des tendances.

« Drôle d’endroit pour une rencontre », c’est le titre que nous aurions pu utiliser pour définir ce portrait s’il n’avait pas déjà été brillamment utilisé par le passé. Au bout d’une chemin bucolique et avec en toile de fond le cadre magique du massif de la Sainte Victoire, nous avons rencontré un créateur aussi discret que talentueux, reclus dans une douillette maison de famille pour préparer sa prochaine collection. Pas étonnant dans un tel décor qu’il revendique la nature et les lumières du sud comme principales sources d’inspiration. N’était-ce son souci du recyclage d’anciens tissus, il ne partage pas grand-chose avec la jeune scène mode contemporaine. Mais c’est justement ce classicisme dans une époque habituée à l’outrance, ce minimalisme quand on ne voit qu’accumulation, ces couleurs discrètes quand la mode ne jure que par le flashy qu’il se singularise.

Comme le suggère aussi votre nom, nous sommes ici au cœur de la Provence, le région qui vous nourrit?

Numa est un vieux prénom que l’on trouvait effectivement Provence mais Figuccia vient d’Italie (Sicile). On est ici dans une maison familiale.  Il y a bien sûr la nature, la lumière du sud mais aussi l’architecture que l’on trouve dans de très belles réalisations maintenant dans le Pays d’Aix qui m’inspirent.

Pourquoi vous être lancé dans le grand bain de la mode aussi vite après vos études?

Après le Bac, j’ai passé cinq ans à apprendre le stylisme et modélisme à Paris. Pour mes stages de fin d’études, j’ai travaillé avec des jeunes designers comme l’Atelier Bartavelle , ce qui m’a donné envier de tester ma propre créativité. Je ne pensais pas que ça irait aussi vite mais je me suis fait confiance.

Au lancement,  il s’agissait plutôt d’un vestiaire masculin mais qui pouvait être unisexe. On a l’impression que c’est plutôt le contraire maintenant ?

Les aixois n’étant pas reconnus pour leurs audaces vestimentaires, ce sont avant tout les femmes qui ont acheté les modèles pensés pour les hommes. C’est pourquoi je me suis orienté principalement vers celles-ci dans les collections suivantes. Et j’ai la chance d’avoir des clientes qui deviennent fidèles.

Où trouvent-elles vos modèles ?

Depuis le lancement de la marque en 2018, j’ai un partenariat à Aix avec une boutique (BO la suite) qui distribue mes collections au fil des saisons et je vends aussi sur mon E-Shop. Grâce à eux, j’ai réussi à fidéliser une clientèle.  On vend de plus en plus saison après saison,  tout en sachant qu’étant seul, je produits très peu de modèles.

Quel est le portrait de votre cliente type ?

C’est une femme sensible à un artisanat local, aux couleurs et matières douces que j’utilise, à une qualité de fabrication des vêtements. Elle souhaite des vêtements un peu unique aussi.

Quels sont les difficultés principales rencontrées au départ ?

Je n’avais pas les financements nécessaires pour me payer un bureau d’études. Mais à travers l’association Fask, j’ai eu la chance de rencontrer Tifenn Guillain. Elle a travaillé dans des grandes maisons de luxe françaises au contrôle qualité. Elle m’a aidé à mettre au point des prototypes de vêtements grâce à toute son expertise dans la haute couture.

Pourquoi ce choix aussi de recycler certains tissus ?

Tout simplement parce que je n’ai pas les moyens de m’engager sur une commande importante de tissus. Alors je me fournis dans des stocks de vieilles collections haute couture à Paris ce qui permet de donner une seconde vie aux vêtements. J’achète aussi auprès de fabricants de tissus d’ameublement qui produisent en France des cotons et des lins d’une qualité incroyable.

 

Vos objectifs pour cette année ?

Être en mesure de plus respecter le rythme du calendrier des présentations des collection et de trouver d’autres points de vente dans les grandes villes du Sud de la France.

L’aspect minimal et épuré de vos créations se prêtent bien au jeu des collaborations avec des belles adresses? 

C’est vrai, j’ai eu la chance de dessiner les tenues du personnel du premier restaurant gastronomique du Château de la Gaude (The Art).

Quel est le thème de la prochaine collection ?

C’est une réflexion sur un hommage à Matisse dont la rétrospective des 150 ans n’a malheureusement pas pu ouvrir à Beaubourg. D’ordinaire je ne travaille que le noir blanc beige et écru. Pour la première fois je vais mettre des couleurs dans ma palette de tissus en hommage au maître. J’adorerai pouvoir présenter cette collection au Château La Coste, dans un de leurs nouveaux bâtiments conçus par Rodgers qui fût également l’architecte de Beaubourg.

Photo portrait et propos recueillis par Eric Foucher