Voilà quelqu’un qui bouscule les codes et affirme sa singularité ! Anthony Marras, le très jeune chef du restaurant Narcisse est ici comme un roi dans son fief. Sûr de lui, de sa créativité et de son talent, qui n’en est qu’à ses prémices, il relit en effet certaines pages l'Histoire de France en réinterprétant à sa façon des plats d'époque.
Pour évoquer le premier restaurant du chef Anthony Marras, on pourrait utiliser l’adage assez commun mais qui a le mérite d’être explicite, le talent n’attend pas le nombre des années. Mais dans le cas de ce jeune chef ambitieux (23 ans seulement), il faudrait ajouter quelques qualificatifs, comme l’audace, la combativité, la rage peut-être même, de réussir. Une énergie de guerrier que ne renie pas celui qui cite plus volontiers l’Art de la Guerre de Sun Tzu que JuL.
Situé dans une ruelle au charme tout aixois, loin de l’agitation des rues toutes proches qui débordent de badauds, comme hors du temps, le restaurant Narcisse pose immédiatement sa carte d’identité.
Un lieu intimiste, à l’écart, baigné d’Histoire(s). Il suffit de franchir le pas de la porte pour plonger dans l’univers singulier du jeune chef et de sa compagne qui gère le service en salle.
Amphores, candélabres, tapisserie de la Dame à la Licorne, cave voutée au charme d’antan, il ne faut pas être devin pour comprendre que la seconde passion d’Anthony, après la cuisine, est l’Histoire, particulièrement le monde gréco-romain et l’histoire de France.
Des époques dont il fait revivre le legs gastronomique dans l’assiette, version 21èmesiècle.
Au programme : pétillantes huîtres Louis XIV (avec poires pochées à la Wiliamine, citron caviar, fleur de bourrache), délicats œufs Louis XV, croquants Pithiviers (canard confit, mousseline de sot-l’y-laisse, foie gras et chanterelles) ou folle pintade en croûte de chocolat.
Du côté des desserts : baba au rhum épicé, Paris-Brest dévot et autres gourmandises étonnantes. On laisse Anthony nous expliquer avec passion et érudition l’Histoire et les histoires autour de ses plats, le charme du restaurant est aussi dans ce partage-là.
Au fond plus Ulysse que Narcisse, Anthony Marras a la même quête, à travers sa cuisine, que ses lointains prédécesseurs, la recherche de la perfection et de la beauté qui mènent au Saint Graal : le kleos, l’immortalité.
Le Petit Plus : Anthony fait la tournée des grands ducs tout l’été et balade sa cuisine historique chez ses amis du Domaine Ogier à Châteauneuf-du-Pape ou au Domaine Tour Campanets au Puy-Sainte-Réparade. A suivre.
Par Valérie Vangreveninge