Bracelets en filet de pêche tressé, colliers en plastique et bois récupéré, boucles d'oreilles en verre dépoli, la matière première des bijoux est bien trouvée dans la nature, mais est loin d'être naturelle. Sauvage lui offre une seconde chance.
Le « double choc » : c’est comme ça que Manu Laurin, tout juste arrivé de Bourgogne en Provence, décrit sa rencontre avec la Méditerranée. Il inclut dans l’expression le choc esthétique… Mais aussi son effarement face à la quantité de déchets qui y flottent. Alors, fan de nage en eau libre, il construit en 2017 son premier défi : faire 120 kilomètres à la nage entre Marseille et Toulon et ramasser tous les déchets qu’il trouve. Résultat : en moyenne 1 kilo de déchets par kilomètre. De cette expérience sort un très beau film, « le Grand Saphir, une révolte ordinaire » maintes fois primé dans lequel il associe à son combat toutes les autres héros anonymes.
Naît aussi l’idée de Sauvage pour faire de ces déchets récupérés des objets et bijoux. Le premier partenaire sera Palana Environnement, association qui récupère notamment les filets dits « fantômes », ces filets de pêche échoués au fond de l’eau.
C’est ainsi qu’en décembre 2015, la boutique en ligne Sauvage vend ses premiers bracelets en filets de pêche tressés. Depuis, l’association a bien grandi : le réseau se compose désormais d’une dizaine d’associations impliquées dans la récupération des déchets en mer, et l’équipe de Sauvage compte plusieurs bénévoles motivés qui conçoivent, fabriquent, communiquent.
Aux bracelets de pêche se sont ajoutés d’autres objets : des boucles d’oreilles en verre dépoli, des parures en plastique et en bois, des sacs en filet de pêche..
C’est au local de Sauvage, à Aix-en-Provence, qu’ils sont fabriqués artisanalement. La seule intervention extérieure, c’est celle d’une usine qui fond les plastiques pour en faire des plaques, dans lesquelles seront découpés les bijoux.
Pour le reste, tout est fait à la main : tressage, découpage, assemblage. L’équipe s’occupe aussi de la boutique en ligne, de la vente, des expéditions, de la conception et de la communication. Tout le monde est bénévole, et les bénéfices sont reversés aux associations qui collectent les déchets en mer.
Ainsi, Sauvage propose non seulement des bijoux uniques et élégants, mais surtout symboliques : ils nous racontent la catastrophe écologique des déchets en Méditerranée – et par la même, nous enjoignent à agir. Certes, avec 600 000 tonnes de déchets annuels rejetés dans la Grande bleue, il y a peu de chance que Sauvage réussisse, comme le mentionne leur site, à « dépolluer la Méditerranée ». On ne peut que souhaiter pour eux cependant qu’ils arrivent un jour à court de matières premières…
Le Petit Plus : Le « Grand Défi », une compétition de collecte de déchets organisé tous les ans par l’association à Marseille, à faire en kayak ou à la nage !
Par Julie Desbiolles