On pense parfois que nos cours d'histoire nous ont enseigné tout ce qu'il y avait à savoir sur la seconde guerre mondiale. La visite du camp des Milles, ancienne tuilerie devenue camp d'internement d'étrangers et de juifs prouve le contraire.
Se souvenir des atrocités de la seconde guerre mondiale, c’est bien. En tirer des leçons, c’est encore mieux… C’est le parti pris du site-mémorial du Camp des Milles. Ancienne tuilerie reconvertie de 1939 à 1942 en un camp de transit, d’internement et de déportation d’étrangers de juifs (entre autres), c’est le seul grand camp français encore intact.
On y trouve les traces des 10 000 personnes de 38 nationalités qui y ont été enfermées. C’est par tout un travail de recherche (archéologie, témoignages de survivants…) que la vie du camp des Milles a pu être retracée. On apprend ainsi qu’il a d’abord été un camp où les « sujets ennemis » étaient internés, notamment des ressortissants du Reich – bien qu’ils aient été pour beaucoup des artistes opposants au fascisme. Dès l’occupation, il est aussi devenu un camp de transit, où des étrangers désireux d’émigrer attendaient un visa pour fuir la France. Enfin, dans ses dernières années, il était un camp de déportation, d’où partirent 2 000 juifs vers les camps de concentration.
On y explore toute cette vie : la petite histoire des gens du camp, à la lumière du contexte de la grande histoire. On découvre des dessins, poèmes, textes, fresques et peintures faits dans les camps ; ou encore un four à tuiles, dont la devanture a été peinte des mots « Die Katakombe », qui était le lieu de discussion et de théâtre des internés.
Le Camp de milles a hébergé un très grand nombre d’artistes qui y ont créé avec les moyens du bord pour résister. Parmi eux, Max Ernst et Hans Bellmer, deux artistes surréalistes, courant artistique jugé « dégénéré par le IIIè Reich » qui seront sauvé de la déportation par le journaliste américain Varian Fry à Marseille. Au gré des témoignages, on comprend le rôle de l’administration française, mais aussi comment des “Justes” ont réussi à sauver quelques dizaines de personnes…
Par ce cheminement, le Camp des Milles distille une réflexion sur les étapes (politiques, sociologiques, psychologiques…) qui conduisent à un génocide. Et nous invite par la même à les chercher dans le contexte actuel… Avec l’idée que c’est en comprenant précisément comment naissent les extrémismes que l’on a toutes les armes pour les combattre.
Le Petit Plus : le matériel pédagogique en ligne, très bien fait, qui permet de préparer sa sortie ou de retrouver des éléments après.
Par Julie Desbiolles (Photos Nathalie Boscq)